SaintéLyon - 2006

Mon marathon des Nuits Blanches

4h 04 … à Saint Pétersbourg… après 18 ans d’absence

  Saint-Pétersbourg… Non, ce n’est pas le monde du silence… mais plutôt celui de l’indifférence. Du moins si vous êtes marathoniens… C’est curieux, mais c’est ainsi... De fait, à notre arrivée, en cette cité au passé historique des plus riches (c’est l’ancienne Léningrad), et jusqu’au vendredi 29 juin, la veille de la course, nous n’avons pas trouvé la plus petite affiche, la plus petite banderole annonçant le « 18 éme Marathon International des Nuits Blanches ». Bizarre, ça fait bizarre… tout comme le final qui se concrétisera par une médaille un sac contenant des pubs, une banane et un jus d’orange . (photo : Lulu, place de l’Ermitage, avec sa médaille et son sac)

Pour le petit groupe de Français que nous étions, tout s’accéléra et se compliqua… il nous fallait, de toute urgence, retirer nos dossards…  Notre accompagnateur-interprète, après quelques recherches auprès de son agence, réussit à trouver l’adresse du siège de cette compétition. Mais nullement concerné par l’événement, il partit vivre sa vie, nous laissant… livrés à nous mêmes. Bien groupés, par souci d’efficacité, nous nous mettons à la recherche d’un gymnase que nous dénichons, au bout de 45 minutes, et après maintes demandes de renseignements.

Et là … Comment dire ? Non, nous ne nous sommes pas trompés… Nous sommes bien au retrait des dossards d’un marathon international ! Dans ledit gymnase, qui aurait besoin d’un bon coup de rénovation, se trouvent : un mini stand de chaussures, shorts et tee shirts, un autre de ventes d’affiches, une table pour les inscriptions et une autre pour le retrait des dossards… sans oublier la présence d’un médecin qui doit certifier et parapher le bulletin d’engagement au vu d’un certificat de moins d’un mois pour les locaux et, plus prosaïquement, sur présentation du contrat d’Europe Assistance pour les étrangers. Nous nous inquiétons du nombre des participants : nous serions environ 600 ! (vous avez bien lu, je n’ai oublié ni un, ni deux zéros). La surprise passée, nous tombons morts de rire, ce qui ne nous empêche nullement de remplir nos bulletins d’inscription dans notre alphabet… qu’un intellectuel traduira en cyrillique (l’alphabet slave que l’on attribue à Clément de Bulgarie et qui daterait de la fin du 9° siècle). Cela fait, une brave dame nous distribue notre dossard ainsi que -pour les étrangers- notre diplôme de participation. Y’a pas à dire, l’artisanat russe a toujours beaucoup de charme... qu’à cela ne tienne, une nouvelle partie de rigolade avec la distribution des tenues : un débardeur bleu pour les 7 coureurs et un maillot blanc pour les 25 membres du groupe, le tout  estampillé France, en cyrillique, dans le dos.

Redevenant sérieux, nous décidons de repérer le parcours : départ devant le musée de l'Ermitage, arrivée au même endroit , après avoir fait un grand 8 et franchi une vingtaine de ponts. Aucune affiche sur le marathon, aucune publicité, aucun panneau d’indication du parcours… Je me dis que le risque de se perdre est réel… alors je prévois de mettre dans ma poche l’adresse de l’hôtel.

Et, vint le samedi 30 juin tant attendu… Le départ étant prévu à 17 h., nous quittons notre hôtel à 15 h., tous ensemble et à pied, dans une fort joyeuse ambiance… notre maillot estampillé « France» fait sensation. Le temps est très chaud, plus de 30 degrés… Et nous arrivons devant le magnifique musée de l’Ermitage, sur une place ENORME… du coup le nombre de participants parait encore plus insignifiant. Tous les coureurs de notre équipe se regroupent sur la ligne de départ… J'étais donc près de Didier et Thierry… près de l’arche de départ, près de tout le monde d'ailleurs… le peloton ne prenant pas beaucoup de place, c’est pourtant un départ commun pour le 10km  et ce 18° Marathon International… qui bénéficie de la présence d’une grosse délégation d’Italiens et de plusieurs groupes de Français. La distinction des coureurs du 10 et du marathon se fait à la couleur du numéro de dossard et à une puce pour les marathoniens (un bout de plastic jaune) accroché au lacet.

Le top départ donné, préoccupation principale ne pas se laisser embarquer par la vitesse de ceux qui font le 10. On «s’élance» donc tranquillement en profitant du spectacle. Nous resterons ainsi ensemble avec Didier et Thierry pendant les 20 premiers km…. Je surveille mon cardio. Nous passons au ravitaillement du 5 en 28’ 10, des bouteilles par terre mais plus d’eau, mais nous savions que nous pouvions avoir ce type de problème et avons nos gourdes.

Les dix premiers km en 56’ 30 nous visitons le centre historique. Puis voici le 15ème qui s’annonce, il fait chaud, très chaud. Les premiers dégâts de la chaleur sont visibles, beaucoup sont partis trop vite et payent déjà. Je constate que lorsque nous passons dans des endroits ombragés mes pulsations baissent, c’est donc la chaleur qui les fait monter. Je décide de ne pas m’en préoccuper et de maintenir le rythme.

Nous passons le 20 km en 1h 54. Le soleil a décliné, il fait plus frais. Le parcours est plus abrité, je me sens bien… deux gros ponts de suite et un ravitaillement entre les deux. On longe la Neva, face au vent, mais ça va. C’est le passage dans les quartiers de banlieue pour ne pas dire « la zone ». Thierry est facile, mais il a tendance à accélérer. Je décide de ne pas me laisser embarquer dans un rythme qui me mènerait au mur, je lui conseille de continuer sans moi. « Je partirai au 25ème » qu’il me dit. Au 25ème, donc, comme promis chacun prend la course à son compte, Thierry nous distance tranquillement.

Au 30ème, j’en suis à 2 h 52’ de course. Je me sens bien, même si ma cadence baisse un peu. Je sais qu'il y a pas mal de Français devant moi. Petit à petit je les remonte, bien content de m'être préservé au début du parcours. Deux kilomètres plus loin, j’aperçois Thierry. J’arrive à sa hauteur, des crampes commencent à lui chatouiller les mollets. Il me demande de continuer sur ma lancée… Là, je me mets à croire que, finalement, je peux le faire en moins de 4h 15, alors que j’étais parti pour me contenter d’un 4h 30. Miracle… je me sens pousser des ailes, les jambes, certes, sont un peu lourdes, mais je suis capable de maintenir mon allure. Je cours au feeling… le marquage des kms ne se fait que tous les 5 kms… je ne peux pas, je ne veux pas me baser dessus non plus pour savoir à quelle vitesse je cours. Je me fie aux sensations et ne me fais toujours pas violence, d’autant plus qu’à ce moment du parcours beaucoup souffrent, ralentissent, et marchent pour certains …moi je me sens super bien, et je double, je double….

Vers le 38ème, première alerte, les mollets se contractent anormalement. Ca devient dur. Il reste combien de palais à longer ?. Je savais que la ligne droite de fin serait interminable. La route devient vraiment pénible, pas de spectateurs, on est sur une voie rapide entre les palais et le fleuve. C'est mortel, mortel… Je vois poindre au loin l’Ermitage, et me demande si je n’ai pas loupé le panneau du 40ème… Mais non, il est là juste après le passage d’une trémie. Au 40ème je suis en 3 h 51’ 30. Le ravito tant attendu est là, mais comme pour les autres points il n’y a que de l’eau et des bananes. Une petite bouteille et un "coup de fouet" font effet immédiatement. Je me dis qu'en mettant tout… alors j’accélère franchement et bizarrement mes jambes répondent. J’arrive à l’Ermitage, mais sa façade n'en finit pas. Heureusement, nos accompagnateurs sont là, le moral vire au beau fixe. Sur les 300 derniers mètres il y a enfin de l'ambiance. Je me surprends à pousser une véritable accélération et à la maintenir… jusqu’à l’arrivée, à l’aise, en profitant des cris de joie des autres membres du groupe. Je passe sous l’arche… le temps indiqué : 4h 04!. 4 h 04… pari réussi pour ce retour sur marathon après 18 ans d’absence !.

Ma médaille autour du cou, mon sac (avec ses pubs, sa banane et son jus d’orange) à la main… je me pose sur une chaise et je bois ... Ce n’est pas terrible, mais je suis content car j’ai eu de supers sensations à la fin, ce qui est plutôt rare sur un marathon. Thierry termine en 4 h 18 et Didier en 4 h 22…. De l’avis de tous les concurrents présents dans le sas d’arrivée, le facteur météo a induit une augmentation des temps d’environ 8% soit entre 15 et 20 minutes, ce qui ne manque pas de me réjouir.

Dans l’ensemble, le parcours, qui nous permettait de voir des bâtiments magnifiques, était roulant avec tout de même le passage de 20 ponts… oui, oui... Mais, et c’est une grosse déception, nous n’avons pas pu compter sur les encouragements de la population. Si nous avons couru dans un site exceptionnel ce fut dans l’indifférence totale des habitants de la ville …..

Cela dit, j’ai mis un point d’honneur à répondre « merci » en russe aux rares encouragements des autochtones… en russe, en leur criant « pasiba »... Mais oui, merci se dit « pasiba ».  

                                                                    Votre  Lulu  Préféré