Sont
les filles
du grand
JOCEL
J’avais voulu
voir Vesoul, et y suis parvenu... voir Vierzon, et y ai même travaillé... voir
les ponts de Paris... ce qui me permit, une nuit, de
m’y enfiler (bigre) dessous, en bateau mouche... voir Camaret, où son
célèbre curé me fit faux bond... voir plein d’autres choses, pas du tout
moroses, pour nourrir ma curiosité toujours affamée.
Mais,
que la honte me monte au front, je dois concéder que, jusqu’alors, je ne
connaissais ni La Rochelle ni ses filles... si ce n’est en chanson. Vous
savez... « Sont les filles de La Rochelle... Qu’ont armé un bâtiment...
pour aller faire des conquêtes... Dans les mers du Levant »
Alors, rêvant
de conquêtes... comme beaucoup d’entre vous (petits voyous), j’ai sauté
(bigre) sur l’occasion de ce marathon... avec d’autant plus d’envie que
plusieurs douces amies, du club qui nous ravit, désiraient aussi y faire la
vie. Or, c’est bien connu, ce que femme veut....
De fait, tout se fit très gentiment... et en musique : « Sont les filles
du grand JOCEL... Qu’ont courtisé Môsieur Roland... Pour aller faire les
coquettes... Du côté de l’océan ». Ainsi, prit par les sentiments
Roland, l’imprudent, craqua goulûment. Notre châtiment, pour l’avoir écouté,
fut cruel. Deux jours durant, crachin, embruns et trombes d’eau furent notre
lot. De surcroît, dans le port charentais, pas une fille ne nous
attendait sur le pavé luisant, et la seule fois où nous eûmes l’imprudence
de violer l’intimité d’un bistrot, nos bourses (bigre) furent violemment
prises à partie.
Comble
de la vilenie, en deux jours, nous n’eûmes même pas, hormis quelques unes de
nos supportrices, le loisir de croquer une coucougnette... c’est bébête.
Mais, revenons au marathon. Nous fûmes (bigre) quelques uns à le terminer sous
un véritable déluge. Nous... c’est à dire les amoureux de la vie (plus
Sylvie et Gigi), ceux qui se sont fait une philosophie du « plus c’est
long, plus c’est bon ».
Tout pourtant avait bien débuté, les organisateurs ayant jugé de bon «thon»
de mettre de côté, sur le quai Maubec, les seniors et les V1... les féminines
étant acoquinées, quai Valin, aux V2, V3 and Co. Mais, blottis dans nos sacs
poubelle en plastique et l’esprit ailleurs, il n’était pas question de
monter les couleurs (bigre)... nous ne pouvions que faire la queue ( !).
Toutefois, très bizarrement, en bordure du vieux port, sitôt le départ donné,
j’aperçus une bénévole de l’organisation dressée contre une bite
(bigre), une bite d’amarrage bien sûr, qui nous invitait à l’éviter (la
bite, pas la dame)... par mesure de sécurité.
L’air du large et la première averse je les reçus à la hauteur de l’Allée
du Mail, où est installé un Casino et ses machines à sous. Qu’à cela ne
tienne, le public, très chaleureux, était partout à nous faire les yeux doux,
ainsi que Colette et Monique qui nous attendaient tout près de la rue Porte
Neuve, pour quelques clichés d’autant plus mérités, qu’à partir de cet
instant les averses se mirent à tomber, jusqu’à plus soif et bien au delà.
Devant, Môsieur
Roland et Gérard se prenaient au jeu; Dominique et Jean-Pierre couraient à
l’unisson; Alain commençait à payer son départ; Monique et Michel ainsi que
Bernard et Serge menaient bon train, tandis que, plus loin, un trio se
chamaillait, toujours le même : les deux Michel et Alex. Derrière le
dernier des Michel avait choisi de faire un bout de chemin, du 10ème
au 22ème, avec Ghyslaine. Tout allait pour le mieux dans le meilleur
des mondes.
Et
puis, petit à petit, le Bon Dieu, trahi par sa prostate, se laissa aller sur
notre paradis, semant la zizanie au sein de nos petites équipes. Certains, tous
muscles bandés (bigre) se laissèrent aller sous les trombes d’eau... la
volonté ébranlée (!). Ainsi, peu après le ravitaillement du 30ème
km, derrière un arbre au beau milieu d’un gazon, un joyeux luron, horrible
trublion, perdit une minute, occupé qu’il était à retrouver son zizi
rabougri... (du fait de la froidure, soyez en sûrs). Conséquence directe, à
quelques encablures de l’arrivée, traumatisé par ce laisser aller,
Michou-le-petit refusa d’attendre Michel-l’intellectuel
qui, vaincu par les tonnes d’eau reçues sur le dos, jouait à
Quasimodo... L’arrivée passée, cet honnête retraité, totalement détrempé
et quelque peu égaré, faillit même tomber dans une tranchée. Fort
heureusement le secours vint, divin... en la personne d’Alex-son-cousin qui le
remit sur le droit chemin.
Une heure plus tard, dans notre Novotel préféré, «le coeur bien au chaud,
les yeux dans la bière», nous avions totalement oublié les Rochelaises, et ne
rêvions que de charentaises... surveillés de près par ces dames du JOCEL :
Cathy, Colette, Ghyslaine, Michèle, Monique and Monique, Sylvie, et Véronique.
Mais au fait, les Filles de la Rochelle ? Qui étaient-t-elles ? Ni
filles de joie, ni condamnées de droit commun, elles étaient des conquérantes,
des fondatrices, des pionnières... Des femmes et des adolescentes qui, au
nombre de près de 900, quittèrent la France... de leur plein gré... pour fuir
la misère. Qui s’embarquèrent à La Rochelle, pendant dix ans, entre les années
1663 et 1673, poussées par la volonté farouche de se refaire une vie au Québec,
en y trouvant époux. Beaucoup d’entre elles, d’ailleurs, se marièrent (ou
«furent» mariées) moins de trois mois après leur arrivée dans ce pays neuf
d’Outre Atlantique... où leur communauté comprenaient cinq garçons pour une
fille.
Elles
surent, presque toutes, s’adapter au climat rude de leur nouvelle patrie et
fondèrent des familles nombreuses, ayant en moyenne plus de dix enfants. Ainsi,
et sans trahir l’Histoire, les Filles de La Rochelle peuvent être considérées
comme les mères de la nation québécoise(*).
Cela dit, faut-il que je l’ajoute : aujourd’hui plus qu’hier -et bien
moins que demain- si... « J’aime les filles des bords de mer... les
filles de La Rochelle... les filles des magazines... les filles qu’on voit
dans Elle....» désormais, non
d’une pipe (bigre), je le confesse sortant de ma coquille, «shell» que
j’aime... sont celles du JOCEL.
(*) Dans cette «aventure», le
port de Dieppe joua à peu près le même rôle que celui de La Rochelle.
Michel
SEYVERAT
(Paru dans
Jogginfo 2004, N°1)
LES RESULTATS: