SaintéLyon - 2004

Le pizzaïolo s’est fait bobo

Oui mes amis, Michel Bourgeay s’est fait rouler dans la farine. C’était lors de la dernière SaintéLyon.

L’auteur de ce crime de lèse-majesté ? Devinez !... Toutefois, sachez qu’il lui a, depuis longtemps, pardonné... Le Michel est bonne pâte... L’auteur de cette coquinerie ? C’est tout simplement Monique, son épouse bien aimée. Mais, ce jour là, elle l’a tétanisé son coureur préféré. A l’arrivée, elle lui avait collé 2 minutes dans le nez.

Cela dit, la SaintéLyon n’est pas donnée. Nombre de petits doués, à leurs dépens, l’ont mesuré. Créée en 1951... par le Cyclotouriste (Société Pour le Développement et la Pratique du Tourisme à Bicyclette, fondée en 1925, et plus connue de nos jours comme étant le CT Lyon), cette organisation est l’une des plus anciennes courses françaises, longue distance, utilisant sentiers et chemins de randonnée.

Le Michel, il s’en fout de tout cela. Le vélo, c’est pas son truc. C’est pas un mec qui déraille, lui qui, lorsqu’il était pizzaïolo, servait les clients sur un plateau... Et puis, en 1951, il n’était pas né. De petite reine, en fait, il n’en connaît qu’une seule : la sienne.

1951... les collants, maillots polyester et autres sportwear n’existaient pas. C’était l’époque des pantalons de golf et des canadiennes, l’une des tenues préférées du très regretté Justin-Mary Cuzin, le ’’secrétaire général perpétuel’’ (pendant plus d’un demi-siècle) du Cyclotouriste, l’homme qui, avec quelques amis, fit faire les premiers pas à cette extraordinaire randonnée qu’était Lyon-Saint Etienne ou Saint Etienne-Lyon... une année sur deux ; une aventure qui, les premières années, s’effectuait sur deux jours.

Ce petit rappel fait, apprenez que Michel Bourgeay a bien été pizzaïolo, pendant quatre ans, dans un camion ambulant à Villeurbanne. Monique, à ses côtés, faisait cuire, emballait et encaissait. « Nous les femmes, on en fait toujours plus que les hommes ! »... qu’aujourd’hui, femme comblée, elle ose ajouter. Mais à l’époque, les mains dans la farine, fallait bosser. Ensuite, pour se faire du blé... Mimi et Momo animèrent le ’’Miam-miam, Glou-glou’’, un kiosque dressé à l’extérieur des Nouvelles Galeries à Bron qui proposait des sandwiches, des crêpes, des gaufres, des hot-dogs, des frites et des merguez... Z’avaient les crocs, les deux tourtereaux. Mais, c’est’y pas vrai qu’ils s’aimaient et s’aiment toujours d’amour tendre... le Michel et la Monique... eux, dont les prénoms commencent par   ’’M’’... comme je t’Aime.

Ouais, on est bien loin de la course à pied, me direz-vous... Et bien non, car c’est comme cela que tout a commencé. La première fois qu’il l’a aperçue, il a voulu l’aborder... Elle l’a envoyé... courir... C’était couru d’avance !. Maso, il s’est entêté, enchanté. C’est ainsi, petit à petit, qu’il l’a entraînée –coach avisé- sur des sentiers non balisés et... devant M. le curé. Depuis, « ils courent, ils courent les Bourgeay, les Bourgeay aux coeurs jolis ».

Quant à cette SaintéLyon 2004, elle n’était que le prolongement de leur passion. A l’approche de cette 51° édition, Monsieur et Madame en étaient, respectivement, à leur 4° et 3° participations. Toutefois, « suite à une chute assez douloureuse de Monique, fin octobre, dans la ’’Val Lyonnaise’’, ce n’est que deux semaines avant le jour J que nous avons décidé d’y participer... Je voulais vivre un nouveau clair de lune à ses côtés, ». C’est ainsi, la tête dans les nuages et le coeur bien luné, que le Michel Bourgeay s’est aligné à Sainté. Certes. Mais il n’avait pas digéré les nuits d’insomnie et les câlins amoureux que le genou douloureux de sa dulcinée avait réclamés... et la SaintéLyon, d’entrée, ça monte, ça monte...

A minuit, tandis que Monique babille, vantant la douceur du temps clément et des départs de course donnés à la belle étoile, notre ami, lui, s’inquiète. Avec raison. « C’est vrai, avant même St Christo-en- Jarrez, c’est à dire le premier tiers du parcours, j’ai ressenti de la fatigue. J’avais perdu de ma superbe. Les rôles se renversaient »... et ce n’était pas sous la couette. « Monique, par vingt fois, m’a demandé comment j’étais, si ça allait. C’est elle qui tenait le manche. Pour un homme, c’est tuant ».

A Sainte-Catherine, grâce aux premières descentes, Michel avait un peu récupéré. Mais, à Saint-Genoux... il était sur les rotules. Le ravitaillo lui permit toutefois de faire diversion.

 « A cette occas, il a été très chou, une vraie crème mon Mimi. S’il avait pu, il m’aurait apporté le petit déjeuner au lit » devait, confier, bien plus tard, l’ironique et dynamique Monique, ajoutant « Mais après, dans la descente sur Soucieu-en-Jarrest... il était sans mollet, mon hommelet. Une quinzaine de kilomètres plus loin est arrivée la côte de Ste Foy-les-Lyon... alors là, il n’avait plus rien d’un tigre, même en descente de lit, mon joli chéri. A ce nouveau ravitaillo, l’était pas jojo mon pizzaïolo »... à tel point d’ailleurs que, dans le pétrin, celui-ci l’invita à prendre les devants. « J ‘ai refusée. Je voulais qu’il me le dise au moins deux fois. Mais j’en trépignais d’impatience. C’est au Pont de La Mulatière qu’il a craqué. A trois kilomètres de l’arrivée. Mené à la baguette, il en avait marre d’être pris pour une croûte. J’ai jubilée, et j’y suis allée Une épouse doit savoir montrer son autorité. Question de fierté. Par le passé, c’est toujours lui qui m’avait plantée au détour d’un sentier, ou sur le pavé mouillé »...

C’est ainsi, histoire éternelle, que la belle rebelle chercha querelle... et lui prit 2 minutes en 3000 mètres !.

Les mois ont passé... Depuis, sur l’oreiller, ils se sont mille fois réconciliés. Cela dit, devant vous, je l’avoue: ils n’ont jamais été fâchés, ils se sont toujours aimés, Michel et Monique.... Mais pour moi, plumitif paumé, qui aime délirer, c’est pain béni un amour qui va... croissant.

                                                                                                                                     M.S.